Un plafond pour le théâtre de Rennes, L’Humanité, 10 avril 1914, p. 1.

M. Julien Lemordant expose, en ce moment, à la Galerie Guérault, 3, rue Roquépine, les études préparatoires et les fragments d’un plafond destiné au théâtre municipal de Rennes. L’artiste, dont on connaît le talent chaud et vigoureux, n’a pas cru devoir, en cette circonstance, recourir à l’allégorie et il a fait, à la fois, œuvre de joie, en magnifiant simplement la réalité. Au-dessus des genêts, des ajoncs, des coquelicots, plantes caractéristiques de leur pays, Bretons et Bretonnes, dans leurs beaux costumes traditionnels, sont emportés dans l’espace au rythme du biniou qui scande les danses coutumières. Une composition très étudiée, très équilibrée, mais d’allure tout à fait spontanée, un jeu souple de lignes, des colorations riches et originales concourent à l’harmonie de cette page neuve. Les spectateurs du théâtre de Rennes pourront l’admirer d’ensemble, car, par une innovation fort heureuse, le lustre central, naguère obligatoire, a été supprimé et elle prendra toute sa valeur dans le recul et sous la lumière dont l’artiste a prévu les effets. Pour nous, nous applaudissons des deux mains à une œuvre qui témoigne, une fois de plus, qu’en tout ordre, pour les développements monumentaux comme pour les toiles de chevalet, la réalité présente offre d’infinies ressources à qui sait l’interroger.