Léon Rosenthal, militant, critique et historien d'art
Alexandre-Gabriel Decamps (1803-1860)
Quelles étaient donc les affirmations nouvelles ou importâtes apportées par cet artiste brillant ? La première est qu’il est possible d’être un grand peintre sans être doté de qualités intellectuelles intéressantes et sans s’adresser à la pensée. Il n’est guère d’ordre d’inspiration auquel il n’ai puisé ; il a pratiqué avec prédilection l’orientalisme, peint des paysages, des scènes de genre, illustré la Bible, les Evangiles, l’antiquité classique et même des romans, bien qu’il n’eût pas l’esprit livresque ; il a traité des sujets de fantaisie pure. Mais, en tout ordre, il ne recherche que des prétextes à peinture. Ses thèmes sont vagues, indéterminés ou menus : c’est un épisode de chasse, une sortie d’école turque, le retour d’un berger, des singes peintres ou experts ; l’esprit ne saurait s’y arrêter. […] Decamps s’abstient, le plus souvent, de toute intention dramatique. Représente-t-il un drame, on sent qu’il n’en est pas personnellement touché. […] Decamps n’est pas ému et il ne se soucie pas plus de nous remuer […]. Une pensée nette, peu complexe, parfaitement lucide et accessible à tous, voilà le point de départ de toute œuvre de Decamps. Il y joint une pointe de malice, une intention de raillerie qui, elle aussi, est très claire et ne saurait dérouter.